L’Afrique aux africains ?

Quelques jours après notre atterrissage à Dakar, nous avons eu la chance de rencontrer Sadio et Kante, avec qui nous avons cheminé quelques heures en voiture en direction de l’exploitation agricole de Sadio et de son père. L’occasion de poser les questions cruciales qui, personnellement, me tiennent à coeur…

Nous vous invitons à découvrir cet interview de Sadio Siby avant de parcourir le bref (et très simple) « compte-rendu » de nos échanges ci-après.

Quel est l’avenir du Sénégal ? Quelles sont les solutions pour son développement ? Quels sont les freins ? Qu’est-ce que vous faites aujourd’hui pour développer le pays ? Autant de questions qui comblent sans effort 2 ou 3h de covoiturage à travers les nationales sénégalaises.

L’éducation en Afrique

Bien sûr l’éducation est un remède ; peut-être même LE remède primordial pour faire évoluer le pays dans le « bon sens ». L’ennui, c’est que quasiment tout est à refaire. Le colonialisme est passé par là ; le néo-colonialisme continue son chemin tranquillement. Ici le nom des rues est en train de changer progressivement, remplaçant par exemple « Pompidou » par « Check Anta Diop ». Ça passe par là !

La langue ! Héritage voulu ou non, ici la langue officielle est le français. Pourtant il existe une bonne dizaine de langues locales, dont le Wolof ultra dominant. Qu’on ne s’y trompe pas, c’est aussi une langue écrite. En attestent les nombreux panneaux publicitaires à l’effigie des marques internationales qui, là, séduisent le consommateur sénégalais dans sa langue. On le sait, la culture passe pour beaucoup par la langue. Pourquoi n’est-elle pas (ou très peu) enseignée dans les écoles. Selon nos interlocuteurs, le progrès passe par là aussi. On veut bien les croire, même si on imagine qu’il s’agit d’un atout considérable pour le commerce international que le français soit aussi largement pratiqué.

Et bien sûr l’histoire. Longtemps le flou entourait l’histoire du Sénégal, hors co-histoire occidentale. Or l’histoire existe, elle est riche, elle est longue, elle est connue, et surtout mérite d’être apprise de tous les jeunes sénégalais pour envisager un futur forgé sur une identité propre, authentique. Là encore, les programmes sont à revoir. Le chemin sera long ; mais il existe un chemin.

Les affaires

Les grands travaux ? entreprises françaises d’abord, puis depuis plus récemment chinoises, américaines, ou du golfe persique. La quasi totalité des secteurs (énergie, industries, construction…) est verrouillée par les multinationales. Le port autonome de Dakar vient à peine de prendre la dimension de son nom (« autonome ») en mettant à la concurrence sa gestion. Mais quel que soit le concessionnaire, si les dockers sont bien sénégalais, l’essentiel des cadres semble demeurer occidentaux ou assimilés.

Ces dernières décennies -trop- peu de transfert de compétences. Si les matières premières sont non délocalisables, la transformation (la valeur ajoutée) se fait majoritairement ailleurs. On nous explique que tout a été fait pour maximiser la dépendance du Sénégal vis à vis de l’occident, en particulier de la France.

L’agriculture, l’alimentation

Difficile à croire dans un pays où la terre est par nombre d’endroits fertile (nombre de fleuves coulent à travers le pays), où les terres agricoles sont légion, où certaines productions sont exportées même, mais le Sénégal importe plus de la moitié de sa nourriture

Kante et Sadio nous expliquent comment le colonialisme a modifié jusqu’à la nature même des produits cultivés, parfois moins adaptés à l’environnement local que les cultures millénaires. Par exemple, la culture du riz qui a grignoté celle du mil, autrefois largement consommé dans le pays. Et le riz, aujourd’hui, est bien sûr en partie exporté vers les pays lointains qui approchent de la crise alimentaire, ou qui ne peuvent plus produire suffisamment pour leur population ultra croissante.

L’objectif affiché du nouveau président pour les années à venir : l’autonomie alimentaire ! Nos amis s’inscrivent dans la dynamique et mettent leur énergie au service de cette cause vitale pour le pays.

Tableau noir, ou est-ce l’heure de l’espoir ?

Par soucis d’honnêteté, nos interlocuteurs concèdent que la tendance est tout de même au fameux co-développement. De plus en plus d’organisations de développement voient le jour, qu’elles soient sénégalaises ou étrangères, pour organiser le transfert de compétences et de technologies.
Surtout, leur espoir est nourri par l’éveil des consciences des nouvelles générations, dont on voit que l’élite revient de plus en plus nombreuse « au bercail » après avoir étudié à l’étranger, dans un profond soucis de développement.

Comparé à certaines expériences passées en Afrique de l’Ouest, force nous est de constater qu’ici point de haine de l’occident. Comme si cette étape là était passée. Ou en tout cas, ce n’est pas le sujet. L’heure est à l’urgence de « construire une Afrique africaine », avec le bagage qu’elle a, souhaité ou non. Les épisodes des 2 derniers siècles, s’ils ne sont pas digérés, sont en passe de l’être. Cap sur l’avenir, qui passe forcément par l’indépendance.

Cette indépendance, elle sera le fruit de profondes mutations qui ne pourront se faire que sur de longues décennies. Mais, semble t-il auprès de nos interlocuteurs, l’espoir est de mise. Nous le croyons aussi, et y joignons humblement nos contributions, ne serait-ce qu’en diffusant le message. Car il ne peut en être autrement pour construire un développement et une paix durables.

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