Découverte de Sobo Badè : OVNI à plus d’un titre

Fin mars, nous quittions Sandicoly le coeur lourd à la poursuite de nos aventures sénégalaises. On nous avait parlé à maintes reprises de Sobo Badè, structure touristique et culturelle que Justine avait aussi repéré au fil de ses recherches. Malgré le site internet et les échos que nous en avions eu, nous étions loin de nous douter de ce qui nous attendait à Toubab Dialaw…

De Sandicoly à Sobo Badè

Nous quittons le Sine Saloum une dernière fois à 10h du matin. Refroidis par le dernier -long- trajet en taxi brousse, où nous expérimentâmes la sortie de route miraculeuse, nous partageons une voiture « privée » avec deux nouvelles amies. Une italienne vivant à Dakar et une américaine qui découvre l’Afrique pour la première fois, enchantée. Le hasard du voyage fit que nous nous rendions au même endroit, après s’être croisés au Campement du Niombato, chez Claudine. L’occasion de découvrir Cinéclyco, une association pour laquelle travaille l’une d’entre elle. L’idée est de partager cultures et connaissances par l’image, le tout grâce à un système ingénieux qui permet de faire des projections grâce au vélo. Chacun est amené à pédaler pendant les projection pour alimenter le matériel de projection. On aime !

L’arrivée dans la ville de Toubab Dialaw, à une quarantaine de kilomètres de Dakar, fut troublante. Après nos presque deux mois de « brousse » dans des paysages parfois sauvages, souvent enchanteurs, systématiquement noyés au cœur de la nature, les collines de la ville en cours de bétonnement intensif sont pour le moins choquantes. Surtout quand on sait à quel point le recours au béton, héritage de la colonisation, perpétué avec insistance par les multinationales occidentales avec l’aval des gouvernements locaux, est une hérésie économique, environnementale et sociale, au regard d’alternatives déjà probantes par ailleurs.

Sobo Badè, Loa vaudou…

Sobo : dieu vaudou (Loa) de l’ orage ; Badè : divinité de l’éclair, symbolisant le son et la lumière. Vous êtes perdus ? Décontenancés ? Et encore, vous n’avez rien vu !

Le premier contact avec l’espace touristique et culturel, forcément visuel, contraste avec les environs. Tout ici est construit de matériaux naturels et / ou de récupération. On pourrait dire du Gaudi… mais en différent. Plus chaud…

Après un repas réparateur, nous apercevons le fondateur, Gérard Chenet, 89 ans, savourant la vue sur la mer. Nous savons l’homme Haïtien… « Kijouan ou yé ? » (Comment vas-tu, en créole dans le texte) ne pus-je m’empêcher de demander dans cette langue que j’aime tant. Sourire aux lèvres, Gérard nous répond dans cette même langue, s’enquérant de nos origines. Mais il sait déjà qui nous sommes, car Justine avait échangé quelques mails avec lui.

Passée la première heure d’échanges, où nous expliquons mieux notre démarche, mais surtout nous abreuvons de toute l’expérience que l’homme aura bien voulu partager avec nous, il est décidé de migrer vers son bureau. Bienveillant, je lui demande si je peux l’aider à se déplacer… ses yeux étonnés, puis son sourire, suffisent à nous faire réaliser ma maladresse. Nous gambadons ensemble vers son bureau.

Un grand homme, une grande œuvre

Il est de ces personnages qu’il est difficile de décrire exactement, tant ce qu’ils véhiculent relève autant du mystique, ou spirituel, que de la raison ; tant ils forcent l’admiration, que ce soit par leur œuvre, leur aura (ou énergie), ou simplement la sagesse dont chaque phrase est éprise. Gérard Chenet l’écrivain, le sculpteur, le bâtisseur, le metteur en scène… est indéniablement de ceux-là. Et l’équipe constituée autour de lui semble emprunte de cette dynamique de mieux être et du mieux vivre, dans une certaine humilité, insufflée par le fondateur.

Nous avons passé 3 jours à Sobo Badè pour découvrir autant que possible ses 48 ans d’histoire et d’expérimentations diverses, qu’il s’agisse de construction, d’énergie, de gestion de l’eau, de culture et d’art…
Au final une quarantaine de chambres, dans plusieurs bâtiments expérimentaux répartis dans trois lieux, deux salles de spectacle à ciel ouvert, une piscine naturelle avec phytoépuration, une série d’ateliers et espaces d’exposition dédiés à la ferronnerie, au Batik, à la musique, la danse, la fabrication de brique ou carreau de terre cuite, la peinture, plus d’une dizaine d’artistes résidents, des dizaines d’autres évoluant à présent en Europe ou ailleurs… et j’en passe !

Sobo Badè est un espace (éco)touristique et culturel dont le rayonnement dépasse les frontières du Sénégal. Un exemple en matière de développement touristique raisonné, intégré, responsable. Un laboratoire non seulement pour un meilleur tourisme, mais aussi et surtout pour le mieux vivre, le mieux être ; pour magnifier la culture dans son ensemble, vecteur à la fois d’identité, d’échange et de compréhension entre les peuples.

Une rencontre des plus inspirantes

Vous le savez peut-être, la graine d’un « HopLab » (ou laboratoire Hopineo) germe tranquillement chez Justine et moi depuis quelques temps. L’idée de regrouper en un seul (Eco)lieu le maximum de bonnes pratiques possibles que nous ou d’autres HopTripers ont pu découvrir au cours de nos voyages ; l’idée de donner à voir ces bonnes pratiques, de les transmettre, d’accueillir tout type d’expérimentations alternatives en matière d’éco-construction, d’autonomie énergétique, de gestion de l’eau, d’agriculture, de fabrication artisanale et d’auto-construction, de développement local… en bref tout ce qui peut concerner la transition éco-logique.

Autant dire que les nombreuses heures passées aux côtés des artisans de Sobo Badè (et surtout Gérard), allant de surprise en découverte, d’apprentissage en méditation, ont achevé de nous convaincre de notre envie profonde. Surtout, les conseils et l’expérience de Gérard Chenet, au delà de nous nourrir infiniment, nous ont montré que… c’est possible.

C’est possible de faire un rêve, de s’y accrocher et d’y tendre, inlassablement. C’est possible de commencer avec rien -ou presque- si ce n’est sa volonté, sa vision. C’est possible de mixer, de pousser, telle une vis sans fin qui malaxe la terre qu’elle fore, autant d’idées que nécessaire, sans limite autres que celles de l’imagination, de la cohérence et de l’intégrité de la démarche vis à vis de soi-même.
« Petit à petit. » C’est, plein d’humilité, le conseil le plus déterminé qui nous sera livré lors de notre riche séjour. Le second : « Chacun doit exercer au moins un art régulièrement. Il est essentiel de créer, de maintenir l’esprit en éveil. Cela fait partie intégrante du rythme respiratoire de la vie. »

Concluons en évoquant la pratique de la concordance des rythmes, du système rythmique universel… en un mot la rythmanalyse, dont Gérard Chenet est un fervent praticien et qui, par opposition à la psychanalyse, fait appel à la clair voyance consciente plutôt qu’à l’inconscient profond de l’être. Si l’affaire a retenu notre attention, nous vous laissons satisfaire votre curiosité en creusant par vos soins, sans toutefois ne pas vous proposer deux premières entrées : Wikipedia et  le Centre National de Ressources Textuelles et Lexicales.

Vous pourrez bientôt retrouver ce nouveau HopHost sur Hopineo.org. Si vous passez au Sénégal, ne commettez pas l’erreur de ne pas passer par Sobo Badè. Vous passeriez à côté de belles rencontres, et de beaux moments, qu’ils soient culturels, créatifs ou simplement de détente dans un environnement propice à l’inspiration, voire l’introspection, et au repos.

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